Niamey, on dit quoi ? (4)
Pendant que les syndicalistes de la CEDEAO, les \ »vagabonds de la démocratie\ » et les forces obscures qui les tiennent en laisse menaçaient les nouvelles autorités nigériennes d\’intervenir pour rétablir l\’ex-président Mohamed BAZOUM dans ses fonctions, l\’un des fleurons de la françafrique a été subitement frappé par un autre coup d\’État.
Le maître des circonstances et des horloges a détourné l\’attention des va-t-en-guerre sur le Gabon. Cette autre vache à lait longtemps spoliée par les entreprises et la classe politique françaises : la françafrique.
La France se retrouve avec deux coups d\’État à gérer en même temps.
Deux coups d\’État militaires pour des raisons différentes.
Inutile de revenir sur le contexte et les motivations des deux putschs. On peut au moins s\’accorder que tous deux sont des moyens d\’accéder au pouvoir de manière anticonstitutionnelle.
Pourtant, l\’un semble \ »compris\ » par le camp des anti-putschs d\’hier, en l\’occurrence la France et ses offines habituelles dont la souplesse des réactions traduit mal leur gêne.
Le lynchage médiatique en bande organisée de la \ »dynastie\ » des BONGO est devenu la norme sur la plupart des chaînes internationales d\’expression française.
Or, la dynastie des BONGO n\’est rien d\’autre qu\’une pure fabrication de la France officielle.
Comment brocarder la dynastie des BONGO sans exposer la laideur de ses propres pratiques ?
Exercice impossible !
Du père au fils, point n\’était besoin de gagner les élections pour conserver le pouvoir.
Il suffisait simplement de les organiser pour les gagner. Avec la bénédiction de la France officielle , et ce, pendant plus 55 années.
Lorsqu\’on a un tel passif, il est difficile d\’avoir constamment cette posture de donneuse de leçon.
Les pieds dans le tapis, engluée dans ses contradictions la France fait le dos rond et joue son va-tout. Avec moins de véhémence. Bien sûr !
Les voix de plus en plus audibles des anti-interventions ne peuvent être ignorées par ceux qui croyaient qu\’il suffisait de réunir un \ »bataillon\ » pour déloger les putschistes et re-installer \ »tranquillement\ » leur poulain au pouvoir.
Il ne s\’agit pas de réinstaller un roi délogé à Mooussou!
Il s\’agit de Niamey.
Le palais présidentiel, à Niamey, est dans l\’enceinte d\’un camp militaire. L\’ancien président et le nouvel homme fort y résident, avec les gardes présidentielles.
Comment cette intervention allait se faire avec efficacité ?
D\’ailleurs, le risque que cette intervention revêt a lui seul a suffit à certains observateurs d\’affirmer que ce projet d\’intervention n\’était que du bluff.
Il ne pouvait pas être sérieux.
Pendant ce temps, le bras de fer continue entre la France piquée au vif après cette situation.
E. MACRON clame à tout vent que son ambassadeur à Niamey ne bougera pas parce que les tenants actuels du pouvoir n\’ont aucune légitimité pour demander son départ.
Sur ce coup, comme dans bien d\’autres, avec la France, on n\’est pas à une contradiction près.
E. MACRON \ »traite\ » avec le régime de Ibrahim TRAORÉ, au Burkina Faso tout aussi issu d\’un coup d\’État. D\’ailleurs , nos sources nous font dire qu\’il se débat actuellement pour y faire admettre un ambassadeur à l\’orientation sexuelle \ »inadmissible\ » du point de vue de la pratique culturelle africaine. Je m\’arrête là !
Or, pour Niamey, il se réfugie derrière la légalité pour masquer son mal être.
Reconnaît-il le régime de Ouagadougou ?
Dans tous les cas, il n\’en faut pas plus à Niamey pour prendre des mesures de rétorsion contre le diplomate qui a eu des propos désobligeants, déclaré persona non gratta.
L\’eau et l\’électricité sont interrompues au sein de l\’ambassade de France et les forces de sécurité ont reçu comme instruction de le faire expulser s\’il est pris, ayant perdu son immunité diplomatique au sens de la Convention de Vienne.
L\’esprit des va-t-en-guerre est ailleurs. Ils ont de plus en plus conscience qu\’ils ne sont pas eux-mêmes à l\’abri. Nul ne sait quand et comment la caravane des putschs dits \ »salutaires\ » va les visiter.
Ils ne sont pas tous irréprochables lorsque les putshistes mettent en relief les graves manquements aux principes démocratiques pour renverser des régimes dits \ »démocratiques\ ».
Ils font presque profil bas.
Tous!
Ils rasent les murs du palais présidentiel de Niamey pour vendre un nouveau projet aux militaires.
La CEDEAO et la France ont perdu la partie.
M. BAZOUM est déjà hors-jeu. Ils l\’admettent indirectement.
Derniers barouds d\’honneur.
La proposition d\’une transition de neuf mois dirigée par un civil est dans les tuyaux pour emboîter le pas à Alger qui à avancé six mois.
Les militaires au pouvoir à Niamey n\’entendent pas les choses de cette oreille.
Ils exigent comme préalables la levée de toutes les sanctions inhumaines de la CEDEAO avant toute négociation.
Ils ont BAZOUM, la légitimité populaire, la réalité du pouvoir et par dessous tout une jeunesse africaine à leurs côtés et des Etats disposés à les appuyer en cas d\’intervention. Ils disposent de ce fait une armée invisible contre la France officielle et ses suppôts locaux.
Ils ont tout compris !
En somme, après avoir bandé les muscles, les va-t-en-guerre se dégonflent et apprennent à leurs dépens cette boutade d\’un homme politique ivoirien :
un peuple debout jamais, il ne sera soumis.
Vive le Niger !
Sinan KAMAGATÉ