De la pauvreté des pays à la pauvreté des peuples
A quoi ont servi les programmes d\’ajustement structurel (PAS) pour finir par faire basculer toute l\’Afrique dans le néolibéralisme. Ces faux réformateurs arrogants ont marchandisé et chosifié le système éducatif, la santé publique, les entreprises publiques et les filières marchandes… A cette époque, nous étions fonctionnaire dans un ministère qui a abrité le premier PAS sectoriel du Bénin démarré effectivement en 1988, le ministère du développement rural.
Avant les PAS, il y a eu et continuent les décennies du développement, les OMD, les ODD, les déclarations de Paris, d\’Accra et de Busan sur l\’efficacité de l\’aide puis l\’efficacité du développement alors que l\’Afrique ne vend principalement que des matières premières sur le marché mondial avec des cours qui lui sont toujours défavorables.
L\’Afrique s\’appauvrit par le néolibéralisme, l\’affairisme de la classe politique pourrie avec une gouvernance opaque ancrée dans une corruption qui a gangréné toutes les administrations civiles, paramilitaires et militaires. Plus personne ne songe à l\’amour pour la patrie. On ne bâtit pas une démocratie pluraliste là où règne le pouvoir suprématiste de l\’argent. La seule contradiction principale qui reste ce sont les conflits d\’intérêts autour du pouvoir de l\’argent et les délices des honneurs de posture.
Après la conférence nationale de février 1990, plus aucun parti politique n\’avait besoin d\’idéologie, celle-ci étant réduite à l\’affairisme qu\’autorisait le néolibéralisme. Tout le malheur de beaucoup de pays africains notamment le Bénin venait de ce que nous n\’avons pas conscience des dangers de l\’érection de l\’argent en une valeur suprême d\’un Etat. Ainsi, les hommes politiques sont beaucoup plus des hommes d\’affaires et vice-versa.
Cette allégeance à l\’affairisme d\’État par la confiscation des processus démocratiques naissants par le primat du pouvoir de l\’argent, beaucoup de pays africains le paieront très cher. Pour preuve, l\’aggravation de la pauvreté, les mouvements de rébellion, l\’apparition et l\’extension du terrorisme ainsi que la résurgence des coups d\’État militaires, la fuite des cerveaux et l\’exode suicidaire de la jeunesse sont la conséquence directe du néolibéralisme stimulé par le PAS de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international qui ne passe plus. Les peuples africains sont déçus.
A l\’exception du parti communiste, tous les partis politiques étaient et demeurent des clubs électoraux pour emprunter cette expression chère à feu Eustache Prudencio. Le déclin puis la faillite du processus démocratique au Benin ne vient pas de la conférence nationale mais du PAS qui était la vraie cause de cette conférence nationale et en même temps le missile qui a atomisé les résultats de cet important dialogue national rendu balbutiant malheureusement.
Ce qui détruit l\’humain chez les politiciens et dirigeants africains, c\’est le culte du Ventre, la démagogie du Verbe et l\’apologie de la Vanité au mépris de la Vérité spirituelle et de la Vertu républicaine.
Le facteur aggravant de cette pathologie dangereuse c\’est la rupture du pacte humaniste par ces faux leaders politiques embourbés dans une complicité active avec les hommes d\’affaires nationaux et étrangers pour systématiser la corruption et les surfacturations pour l\’enrichissement vaniteux, l\’endettement inconséquent et inconscient de leurs pays sans souci des générations futures avec la soumission des populations à la vie chère.
Comment comprendre que certains fonctionnaires de l\’État béninois de ma génération soit des milliardaires. Ils ont trouvé l\’argent où ? Et ce sont ces faux hauts cadres mais très bas en éthique qui jouissent d\’impunité de luxe au moyen de leur immunité politique. L\’immunité fait l\’apologie de la délinquance politique et économique.
En fait, l\’Afrique est déjà dans la troisième guerre mondiale du fait de la gourmandise effrénée de sa classe politique irresponsable et irrésistible à la corruption organisée par les sociétés multinationales.
N\’y a-t-il pas un lien entre surfacturation qui est un appauvrissement d\’un pays et la vie chère qui est l\’appauvrissement des peuples à qui les lois liberticides interdisent tout droit de manifestation.
Et l\’Union africaine doit comprendre pourquoi les armes tardent à se taire. La poussée démographique de la population n\’est plus une bombe à retardement, elle a commencé déjà par imploser à travers la propagation de l\’extrémisme violent alimenté par l\’oisiveté des jeunes sans pouvoir d\’achat, sans avenir et sans devenir. Ça suffit, il faut que ça change avant qu\’il ne soit trop tard.
Nos VENTRES et nos VANITÉS ont piégé toute notre humanité. Et voilà aujourd\’hui, nous sommes incapables de proposer une alternative crédible pour sauver la jeunesse de l\’impasse parce que certains politiciens ont confisqué par la corruption le pays rendant impossibles de vraies réformes publiques à impact durable. On bricole, on impose tout et tout s\’anéantit. Tout le monde joue avec le destin du pays. Je m\’insurge contre cette errance de l\’esprit et cette incapacité à coproduire nos dynamiques de changement. Dommage!!!
Professeur Simon-Narcisse TOMETY