Le professeur Théodore Holo parle
A l\’exception du Maroc et de Eswatini qui sont des monarchies , les États africains sont des républiques qui impliquent que les fonctions gouvernementales ne sont ni héréditaires ni à vie. Aussi les Constitutions; après avoir fixé un mandat à durée déterminée pour les fonctions politiques, prescrivent elles en plus plus la limitation du nombre de mandats susceptibles d\’être exercés par les gouvernants. Cette limitation facilite l\’alternance démocratique qui garantit la stabilité des institutions et la paix sociale. En rompant avec cette exigence, les acteurs politiques provoquent des tensions qui malheureusement incitent l\’armée à redevenir l\’arbitre du jeu politique avec parfois un réel soutien populaire qui à son tour entraîne la confiscation du pouvoir par l\’institution militaire. Les États francophones sont les champions de cette rupture avec l\’instauration de fait d\’une présidence à vie, voire héréditaire. En effet, à l\’exception notoire de l\’Ouganda dont le Président MUSEVENI est au pouvoir depuis 35 ans , de MUGABE qui est resté plus de 29 ans à la tête du Zimbabwe et de Yahya JAMMEH qui a dirigé la Gambie pendant plus de 22 ans, on observe que les champions ou plutôt les dinosaures du piuvoir se retrouvent essentiellement en Afrique francophone avec: -Omar BONGO qui est resté à la tête du Gabon pendant plus de 41 ans jusqu\’à sa mort et remplacé par son fils Ali, -Paul BYA à la tête du Cameroun depuis plus de 38 ans , -Eyadema GNASSINGBE ayant fait plus de 37 ans comme Président du Togo jusqu\’à sa mort à qui succéda son fils Faure, -SASSOU N\’GUESSO qui en deux temps avant et après la Conférence nationale boucle 37 ans à la tête du Congo , -MOBUTU qui passa plus de 31 ans à la tête du Zaïre avant d\’etre chassé par Laurent -Désiré KABILA à qui succéda à sa mort son fils Joseph, -Idriss DEBY ITNO qui dirigea pendant plus de 30 ans le Tchad et fut remplacé à sa mort par son fils Mahamat , le recordman actuel est Teodoro Obiang NGUEMA MBASOGO avec plus de 42 ans à la tête de la Guinée équatoriale et dont le fils Ignacio Teodoro est le vice-président. Quand les peuples ne peuvent plus choisir et remplacer leurs gouvernants , ils recourent à la violence avec parfois le soutien de l\’Armée pour les renouveler comme l\’illustrent les cas de : -TANDJA renversé le 18 fevrier 2010 apres plus de 10 ans de pouvoir au Niger – BEN ALI chassé du pouvoir le 14 janvier 2011 après plus de 23 ans à la tête de la Tunisie. -MOUBARAK destitué le 11 février 2011 après un règne de plus 29 ans sur l\’Égypte -COMPAORE au Burkina chassé le 31 0ctobre 2014 après avoir exercé le pouvoir pendant plus de 27 ans -MUGABE qui fut contraint à la démission le 21 novembre 2017 après avoir gouverné le Zimbabwe pendant plus de 29 ans -BOUTEFLIKA contraint à la démission le 02 avril 2019 après plus de 16 ans à tête de l\’Etat algérien – Omar el BECHIR écarté de la présidence du Soudan après plus de 29 ans de règne -Alpha CONDÉ en Guinée, emporté par un coup d\’Etat le 05 septembre 2021 après plus de 10 ans à la tête de l\’Etat. Pour prévenir cette instabilité préjudiciable au développement des États africains, les peuples et la communauté internationale doivent condamner et sanctionner les auteurs, non seulement des coups d\’Etat, mais aussi des manipulations de la Constitution et des lois électorales pour confisquer et conserver le pouvoir dont l\’unique détenteur dans une république est le peuple souverain. Il est donc important d\’œuvrer à l\’émergence d\’une culture démocratique par l\’éducation à la citoyenneté, l\’adoption et le respect d\’un statut des anciens Présidents de la République, d\’un statut de l\’opposition. Les élections étant la source démocratique de devolution du pouvoir doivent être organisées et leur contentieux réglé par des organes ayant la confiance des acteurs politiques et selon des règles consensuelles . La démocratie étant un consensus sur la gestion pacifique des contradictions inhérentes à toute société humaine, la tolérance, la libre, stimulante et féconde confrontation des opinions, le respect du bien commun, le règlement pacifique des différends doivent être les règles d\’or du vivre ensemble .
Pr. Théodore HOLO