Il ne fait aucun doute.
Ce sont les forces ukrainiennes qui bombardent la centrale nucléaire de Zapporijjia, sous contrôle russe, avec les armes fournies par les Occidentaux… Sinon, quel intérêt les Russes ont-ils à bombarder un site qu\’ils contrôlent totalement, depuis le début du conflit, avec des forces sur place et la logistique qui va avec?
Comment les Russes peuvent-ils rester à l\’intérieur de la centrale et \ »s\’auto-bombarder\ »?
Question de bon sens !
La vraie question, de mon de vue, est plutôt de savoir pourquoi les forces ukrainiennes continuent-elles de lancer des obus et autres missiles en direction de la centrale nucléaire, occupée par les Russes, avec tous les risques que cela comporte en terme de catastrophe (cf. Tchernobyl)?
La stratégie ukrainienne est suicidaire à tous points de vue mais pour les ukrainiens elle est rationnelle.
D\’abord, s\’il y a des dégâts, les communicants occidentaux les attribueraient au \ »méchant agresseur russe\ » et en fonction de l\’ampleur elle pourrait de facto justifier une entrée de l\’OTAN, des États-Unis dans la guerre directement; toute chose que le président ukrainien V. ZELENSKY appelle de tous ses vœux depuis le début du conflit. L\’Ukraine rêve d\’un électrochoc pour changer la nature du conflit. Mais, les Occidentaux sont-ils disposés à faire une guerre ouverte avec la Russie ? Leurs opinions publiques sont-elles favorables à une telle escalade ?
Au demeurant, la Russie ne cédera jamais à l\’Ukraine cette centrale, véritable butin de guerre, qu\’elle pourrait monnayer dans le cadre d\’une négociation de paix. Seule issue de ce conflit.
Ensuite, en bombardant, les forces ukrainiennes espèrent reprendre la centrale nucléaire de Zapporijjia. Récupérer sa centrale nucléaire des mains des Russes, la plus grande de l\’Europe, qui alimente près de dix millions d\’Ukrainiens, les forces de ZELENSKY espèrent non seulement obtenir une victoire symbolique mais aussi stratégique. Symbolique pour le moral de ses troupes à la hauteur de celle des Russes sur le fameux bataillon Azov, à Marioupol et la prise du Donbass. Et stratégique aussi parce qu\’elle montrera aux sceptiques la capacité des forces ukrainiennes à mener des contre-offensives victorieuses face à la superpuissance russe, face à l\’agresseur.
Dans cette guerre qui se déroule sous nos yeux, on peut aisément noter que les instruments internationaux pour le règlement de ce type de conflit, notamment les sanctions sont inappropriées, désuètes et inefficaces surtout lorsqu\’il s\’agit de puissance de la taille de la Russie.
En réalité, les sanctions, quelle que soit leur nature, n\’ont jamais fait plier un régime ou le système politique d\’une nation qui s\’est donné les moyens d\’agir. l\’Iran est bien là pour nous le prouver, sous sanctions depuis les années 1970 et Cuba depuis 1962.
Malgré cet état de fait, les Occidentaux ont fait le pari d\’une défaite de la Russie et de son affaiblissement comme objectif stratégique d\’où la fourniture de renseignements militaires et d\’armes de pointe à l\’Ukraine et la prise d\’une batterie de sanctions à la fois économique et diplomatique.
Au bout de six mois de conflit, la moisson est bien maigre. La note plus que salée pour tous. Les prix des hydrocarbures ont flambé, le blé est devenu rare. Le monde entier découvre subitement que la Russie n\’est pas seulement une puissance nucléaire. Elle est aussi une puissance agricole. Et mieux, elle fait preuve d\’une résilience incroyable. Le rouble, la monnaie russe, au lieu de s\’effondrer a pris des ailes. Mieux, un nouveau système monétaire est en cours d\’élaboration. Ce système est destiné à minimiser l\’utilisation du dollar dans les transactions et le système Swift. Le conflit russo-ukrainien a montré à quel point les Occidentaux utilisent ces instruments comme des armes de déstabilisation économique contre les \ »empêcheurs de tourner en rond\ ». Contre les \ »récalcitrants\ », les réfractaires à l\’ordre établi par eux. La liste des gains russes dans ce conflit est longue.
Qui pouvait prévoir un tel scénario ?
Avec ce qui se passe sur le terrain (militaire), il est évident que chaque partie semble avoir sous-estimé les capacités de l\’autre.
Or, du côté russe le socle de soutien du peuple à son leader est au zénith et le sera sans aucun doute même si le conflit devrait s\’étendre dans la durée. De l\’autre côté, le bloc occidental qui fait la guerre à la Russie, par Ukraine interposée, a peu de chance de rester soudé tant les intérêts stratégiques sont divergents.
En effet, si pour le blé, une solution a pu être trouvée grâce à la diplomatie turque, pour le gaz, c\’est pratiquement le sauve-qui-peut.
L\’Allemagne, la locomotive de l\’Union européenne est fortement dépendante du gaz russe, la Hongrie et les pays baltes également. Ces Etats ne peuvent pas avoir la même position que les autres sur la portée des sanctions..
Sur la question, la France fait des gorges chaudes parce qu\’elle est moins de dépendante des hydrocarbures russes. Ll\’Italie est allée voir du côté de l\’Algérie, au grand de dam du colon français, en perte d\’influence. On peut noter que dans la (con)quête du gaz, les Occidentaux se montrent moins regardants sur le respect de la démocratie et des droits humains, valeurs qui fondent leurs prises de position dans le monde entier. Ils n\’ont pas hésité à mettre en scelle le prince saoudien Mohamed Ben SALMANE (MBS), sous le coup de sanctions à la suite de son implication dans la mort, dans des conditions de cruauté inouïe, du journaliste saoudien Jamal KHASHOGGI, à l\’ambassade du royaume d\’Arabie Saoudite en Turquie. Hier, au banc des accusés et paria, il est devenu subitement fréquentable aujourd\’hui. L\’Algérie aussi. L\’hiver approche à grands pas, l\’Europe a plus que jamais besoin d\’avoir de quoi se réchauffer. À tous les prix!
Comme quoi, la diplomatie des hydrocarbures est au-dessus des principes et valeurs démocratiques. Real politik oblige !
Sacrés Occidentaux qui ne sont jamais à une contradiction près.
Ça, on l\’a compris depuis longtemps.
Dieu merci !
Sinan KAMAGATÉ